Depuis maintenant plusieurs mois les interrogations devenaient grandissantes concernant l’évolution de l’opération Barkhane. Le couperet est tombé. Le président Emmanuel Macron a finalement tranché en annonçant mettre un terme à cette OPEX (opération militaire extérieure) qui avait débuté en 2014 afin de lutter contre le djihadisme qui prolifère dans la région du Sahel.
Après plus de huit ans sur le terrain, l’intervention française au Mali et plus largement dans la région des trois frontières (Mali, Burkina Faso, Niger) devrait changer profondément de nature. La persistance de la dégradation du contexte sécuritaire au Sahel a conduit en effet l’armée française dans une impasse [1]. En marge du G7, l’annonce d’Emmanuel Macron vise non pas à mettre un coup d’arrêt à la présence militaire française dans la région, mais à opérer une transformation profonde pour relancer l’élan stratégique d’une intervention armée qui ne cessait de s’enliser. Le changement de paradigme actionné par l’armée française intervient peu après le coup d’État qui a frappé le Mali. Cette transformation résulte également de la montée, chez les populations locales, des sentiments anti-occidentaux suite aux bavures de l’armée française causant la mort de plusieurs civils maliens en mars 2021 [2].
Lorsque la multiplication des initiatives militaires sur le terrain était jugée responsable par les spécialistes de la formation d’un embouteillage sécuritaire, celles-ci permettaient tout de même de soutenir activement le G5 Sahel. L’action de cette coalition militaire de cinq pays de la bande sahélo-sahérienne (Mali, Burkina Faso, Tchad, Niger, Mauritanie), qui peine aujourd’hui à lutter contre cette menace terroriste en pleine mutation, risque de se précariser encore davantage et l’attractivité des groupes armés terroristes (GAT) pourrait s’accroitre [3].
« Au Sahel, cette transformation se traduira par un changement de modèle » indiquait ainsi Emmanuel Macron, ce jeudi 10 juin 2021, lors de la Conférence de presse en amont du sommet de l’OTAN et de celui du G7. La mise en place d’une alliance internationale anti-djihadiste dans la région aura pour objectif de remplacer l’intervention militaire française. Cette semaine, la tournée diplomatique du président Biden en Europe permettra de dessiner les contours d’un tel projet politique, puisque l’appui américain est crucial pour le déploiement des armées locales et européennes (drones, soutien logistique, etc.) [4].
Emmanuel Macron a d’ores et déjà affirmé que les forces spéciales françaises (Sabre) et européennes (Takuba) resteront opérationnelles lorsque la présence militaire au sol de l’armée régulière se réduira peu à peu. La stabilité des États souverains du Sahel et la nouvelle coalition internationale, qui reste par ailleurs à définir, seront donc cruciales pour apporter une réponse sécuritaire large et commune afin d’enrayer la menace djihadiste.
@Photo : Courrier international
Sources :
[1] Michailof Serge (2019). « L’armée française est dans une impasse au Sahel ». France Info/ IRIS.
[2] Richard Sekone Davy, (2021), Accusée par l’ONU d’une bavure au Mali, la France doit reconnaître sa responsabilité. Courrier international.
[3] Forson Viviane, (2021). « Sahel : Emmanuel Macron acte la fin prochaine de l’opération Barkhane ». Le Point Afrique.
[4] Benoit, Daphné, (2021). « Sahel : quel dispositif envisagé pour remplacer l'opération Barkhane ». France 24/ AFP
Pour aller plus loin :
France 24 : « Emmanuel Macron amorce la réduction de la présence militaire française au Sahel » : https://www.youtube.com/watch?v=z7PbGsq07sY
ARTE 28 minutes : Sahel : la France dans une guerre sans fin ? - 28 Minutes – ARTE : https://www.youtube.com/watch?v=Wz1ocd2g22c
IFRI/ Le Monde : Après huit ans d’intervention au Mali, le bilan mitigé de « Barkhane » : https://www.ifri.org/fr/espace-media/lifri-medias/apres-huit-ans-dintervention-mali-bilan-mitige-de-barkhane
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