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  • Photo du rédacteurNariman Asadi

Le « Grand Jeu » version XXIe siècle : nouvel accrochage russo-britannique en Europe orientale

Si le conflit ukrainien reprend de la vigueur depuis plusieurs mois, le récent accrochage entre la marine britannique et l’aviation russe en Mer Noire semble consacrer la Royal Navy comme le fer de lance du hard power de Londres. Elle ferait ses classes en Europe de l’Est, rappelant étrangement le choc frontal du XIXe siècle entre les empires britannique et russe en Orient.


La manœuvre se voulait ingénue et parfaitement légale aux yeux du droit international. Le mercredi 23 juin, le navire de guerre britannique HMS Defender s’approcha des côtes de Crimée un court instant. Arguant emprunter la route la plus simple, et internationalement reconnue, il effectuait son trajet d’Odessa (Ukraine) en direction d’un port géorgien, en vertu d’un droit « de passage innocent » (1). L’opération faisant partie d’un exercice des forces de l’OTAN en Mer Noire, et annoncé comme tel, le passage du bâtiment britannique aurait dû passer comme une lettre à la poste. Or, la Crimée ayant été annexée par la Russie, le HMS Defender se serait introduit dans les eaux territoriales russes sans autorisation, ce que Londres dément puisqu’elle maintient que la péninsule appartient toujours à l’Ukraine (1).

L’aviation russe, en réponse à cette avancée, a tiré en direction du navire en guise de semonce, après de multiples avertissements. Londres nie avoir été prié de devoir dévier sa route et affirme l’agression inattendue. Or, un journaliste de la BBC, se trouvant justement à bord au moment de l’attaque, contredit la version du Ministère de la Défense britannique: la Russie aurait informé le bâtiment d’une attaque imminente s’il ne changeait pas sa trajectoire (2).


En Russie, l’événement n’est pas perçu comme un accident isolé. Selon Vladimir Poutine, Président de la Fédération de Russie, la percée visait clairement à tester la réponse des forces armées. Il s’agirait d’une provocation pure et simple. Diplomatiquement, l’incursion est vue, en se référant encore une fois à la version russe, comme une négation du choix de la Crimée à rejoindre la Russie (3).


Toujours est-il qu’un incident du même type s’est reproduit avec un navire néerlandais que l’aviation russe a harcelé en mer Noire (4). Alors que Paris marque sa solidarité avec ses alliés européens et son attachement au droit international (5), Moscou voit clairement la main de Washington dans ces actions provocatrices, consolidant le bloc opposé à la Russie (3), au moment où l’Union Européenne oscille entre opposition et conciliation (5).


À ceux qui jugent dangereux le jeu d’équilibriste des puissances, entre provocations et repli stratégique, Poutine affirme que la destruction du HMS Defender n’aurait pu causer une troisième guerre mondiale. Malgré les menaces, ce dernier croit que les occidentaux ne désirent pas un conflit qu’ils savent perdus d’avance (3). Équilibré ou non, le théâtre de Crimée reste un des points chauds de l’architecture internationale.



@Photo : Ben Shread/MoD, Crown Copyright


Sources :


(1) Sabbagh, D. 2021. « Royal Navy ship off Crimea sparks diplomatic row between Russia and UK». The Guardian. 23 Juin. https://www.theguardian.com/world/2021/jun/23/russian-ship-fired-warning-shots-at-royal-navy-destroyer-hms-defender-moscow-says


(2) BBC News. 2021 « HMS Defender: Russian jets and ships shadow British warship». 23 Juin. https://www.bbc.com/news/world-europe-57583363


(3) Osborne, A. Soldatkin, V. 2021. « Putin says Russia could have sunk UK warship without starting World War Three». Reuters. 30 Juin. https://www.reuters.com/world/putin-says-uk-warship-near-crimea-wanted-test-russias-military-response-2021-06-30/


(4) Forrest, A. 2021. « HMS Defender: Putin claims UK warship near Crimea deliberately tried to test Russian military response ». The Independent. 1er Juillet https://www.independent.co.uk/news/dutch-navy-russian-jets-flew-low-over-frigate-in-black-sea-black-sea-crimea-dutch-moscow-british-b1875067.html


(5) Le Figaro. 2021. « Tensions en mer Noire : Paris solidaire du Royaume-Uni et des Pays-Bas ». 1erJuillethttps://www.lefigaro.fr/flash-actu/tensions-en-mer-noire-paris-solidaire-du-royaume-uni-20210701

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